A peine deux ans d’existence de son agent conversationnel et une prévision de pertes de plus de 5 milliards de dollars en 2024, pourtant la start-up a réussi à lever près de 7 milliards de dollars d’investissements en quelques semaines ! OpenAI, la désormais célèbre organisation américaine, spécialisée en Intelligence artificielle et créatrice de ChatGPT, a annoncé ce mercredi avoir réussi une levée de fonds spectaculaire, de 6,6 milliards de dollars, auprès d’investisseurs et d’entreprises. Un abondement qui devrait valoriser l’organisation créée en 2015 à 157 milliards de dollars.

Cette levée de fonds renforce sa position de start-up parmi les plus prometteuses au monde. Dans le pool d’investisseurs, on retrouve des acteurs phares de l’innovation comme Thrive Capital et Khosla Ventures, ainsi que des soutiens historiques de poids tels que Microsoft, principal investisseur corporate d’OpenAI qui a déjà signé un chèque de 10 milliards de dollars en 2022 pour partager et promouvoir la technologie d’IA. Enfin, Nvidia,le leader du calcul et de la puce fait également à nouveau partie de ce tour de table.

Des entreprises comme Altimeter Capital, Fidelity, le japonais SoftBank et la firme d’investissement d’Abu Dhabi MGX figurent également sur la photo. Thrive Capital, qui a engagé 1,2 milliard de dollars, a par ailleurs négocié une option pour investir un milliard supplémentaire l’an prochain, si OpenAI atteint certains objectifs de revenus.

Une progression exponentielle

OpenAI devrait générer 3,6 milliards de dollars de revenus en 2024, essentiellement grâce à ChatGPT. Mais les pertes prévues dépasseront les 5 milliards. Poussées par le vent de l’innovation et du succès, les perspectives pour 2025 sont toutefois très prometteuses, avec des revenus projetés à 11,6 milliards de dollars, soit trois fois plus qu’en 2024. La popularité croissante de ChatGPT, qui compte aujourd’hui 250 millions d’utilisateurs actifs par semaine, et la montée fulgurante de la valorisation d’OpenAI, passée de 14 milliards de dollars en 2021 à 157 milliards aujourd’hui, illustrent l’incroyable ascension de la société. La fin du tunnel pour la start-up ?

Des tensions internes inattendues

Cette levée de fonds intervient dans un contexte de changements internes importants chez OpenAI. Notamment avec le récent départ inattendu de Mira Murati, arrivée en 2018 et promue directrice technique en 2022, ainsi que deux de ses cadres emblématiques, Bob McGrew, directeur de la recherche, et Barret Zoph, vice-président chargé de la recherche.

Deux autres figures historiques avaient déjà plié bagages cette été, et non des moindres puisqu’il s’agit de deux co-fondateurs : John Schulman et Greg Brockman, ce dernier évoquant une année sabbatique.

Des départs volontaires qui ressemblent à l’épilogue d’un long bras de fer avec Sam Altman, l’un des co-fondateurs avec Elon Musk, et actuel CEO d’OpenAI. Licencié par le CA en novembre 2023 pour dissimulation d’informations, Altman avait été rapidement réintégré suite à une bronca des salariés. Le raz de marée OpenAI semble bien loin d’être un long fleuve tranquille…

Un modèle qui se cherche

Car le modèle économique et philosophique d’OpenAI semble à un tournant. Créée avec la volonté de partager, d’être ouverte et transparente, OpenAI dont le déficit est encore supérieur au chiffre d’affaires, joue gros. Car si l’horizon parait radieux et très prometteur, de gros nuages d’incertitude persistent en matière de coûts, notamment énergétiques, de recherche, développement (dont l’apprentissage) et d’exploitation (particulièrement « l’inférence », c’est-à-dire l’énergie nécessaire pour répondre à chaque requête d’utilisateur), des coûts connus pour être colossaux dans le domaine de l’IA. Cette course effrénée oblige donc OpenAI à dépenser énormément de cash alors que les recettes restent modestes.

Evolution vers une organisation à but lucratif ?

Le financement de cette levée de fonds s’est fait sous forme de billets convertibles, avec une conversion en actions dépendant d’un changement structurel vers un modèle lucratif, ce qui mettrait fin au contrôle actuel du conseil d’administration « à but lucratif plafonné » (depuis 2019) d’OpenAI et supprimerait le plafond de rendement pour les investisseurs. Ce changement permettrait également à Sam Altman, le PDG d’OpenAI, d’obtenir des parts de l’entreprise. Malgré ces changements, l’enthousiasme des investisseurs reste fort, soutenu par les projections de croissance impressionnantes de l’entreprise et… de retours sur investissements.

Vers une IA surhumaine

D’autant qu’OpenAI continue de viser des innovations technologiques majeures vers l’intelligence artificielle générale (AGI), avec l’objectif de développer des systèmes capables de dépasser l’intelligence humaine. Si cette levée de fonds et la restructuration interne annoncée se concrétisent comme prévu, OpenAI pourrait bien réinventer les contours du marché de l’IA et poursuivre sa route vers des innovations et un futur de rupture.