Terra Nova, le think tank progressiste vient de publier une étude sur les effets – positifs et négatifs – de l’introduction de l’IA générative dans le monde du travail, de la formation et de l’éducation. Irruption qui comprend de réels opportunités, selon Terra Nova.
A rebours de nombreux commentaires d’experts en politique social, le think-tank de centre gauche, Terra Nova, qui s’est penché sur la balance bénéfices/risques de l’Intelligence Artificielle, adopte finalement une position mesurée voire optimiste sur l’impact de l’IA générative dans le monde du travail.
Plutôt que « céder à un alarmisme spéculatif », pour reprendre les termes de l’étude publiée ce 3 février, Terra Nova met en avant les opportunités offertes par cette technologie pour améliorer l’accès à l’emploi, réduire les discriminations, enrichir les tâches professionnelles et accompagner les transitions de carrière.
Cependant, le think tank insiste sur la nécessité d’un encadrement collectif et d’une adaptation des systèmes éducatifs et de formation pour maximiser les bénéfices tout en maîtrisant les risques.
Des usages concrets et inclusifs tout au long de la vie professionnelle
Dans son document de synthèse de 31 pages, Terra Nova entre dans le concret quant à la façon dont l’IA générative peut et parfois a déjà commencé à transformer positivement chaque étape du parcours professionnel :
- Recrutement et accès à l’emploi : L’IA Gen facilite la rédaction de CV et lettres de motivation grâce à des outils comme ChatGPT, réduisant ainsi les barrières liées à l’illettrisme ou au manque de maîtrise des outils numériques. Elle permet également d’identifier et de valoriser des compétences issues de parcours atypiques, favorisant ainsi la diversité dans les processus de recrutement.
- Progression professionnelle : En automatisant des tâches répétitives ou techniques, l’IA libère du temps pour des activités à plus forte valeur ajoutée. Elle soutient également les transitions professionnelles en rendant accessibles des compétences techniques auparavant réservées à des experts.
- Inclusion des publics éloignés de l’emploi : L’IA offre un potentiel significatif pour intégrer des populations souvent marginalisées, comme les personnes en situation de handicap ou les réfugiés, en simplifiant leur accès au marché du travail.
Des risques maîtrisables par une approche collective
Malgré ces avantages, Terra Nova met en garde contre certains risques liés à l’adoption de l’IA Gen. Parmi eux on retiendra :
- Les biais algorithmiques : Sans vigilance, ces outils peuvent reproduire ou amplifier des discriminations existantes. Terra Nova recommande une régulation stricte et la création de comités d’éthique dans les entreprises pour prévenir ces dérives.
- Le phénomène du « shadow GPT »: De nombreux salariés utilisent déjà ces technologies sans cadre défini, ce qui expose les organisations à des risques liés à la sécurité et à la qualité des données.
Pour répondre à ces défis, Terra Nova appelle à un dialogue social renforcé entre employeurs, salariés et pouvoirs publics. La négociation collective, estime le think tank, ne pourra faire l’économie d’un encadrement des usages de ces outils tout en anticipant les évolutions des métiers.
Un levier pour la formation et la montée en compétences
A côté de cet état des lieux, Terra Nova s’intéresse à l’importance d’adapter les systèmes éducatifs et de formation professionnelle aux réalités de l’IA générative. Intégrer cette technologie dans les programmes scolaires et renforcer la formation continue sont essentiels pour accompagner les actifs dans cette transition technologique. Les entreprises doivent être incitées à investir dans le développement des compétences de leurs salariés afin d’exploiter pleinement le potentiel offert par l’IA Gen.
4 recommandations principales pour une IA bénéfique et acceptée :
Au final, Terra Nova fait plusieurs recommandations pour maximiser les bénéfices de l’IA générative tout en maîtrisant ses risques. Voici les principales préconisations mises en avant :
- Promouvoir un dialogue social au sein des entreprises : Terra Nova insiste sur la nécessité d’intégrer l’IA générative comme un sujet central de discussion entre employeurs, salariés et partenaires sociaux. Cela permettra d’encadrer son déploiement, d’anticiper les évolutions des métiers et de prévenir les dérives potentielles.
- Investir dans la formation professionnelle : Les entreprises doivent être incitées à former leurs salariés aux nouveaux outils liés à l’IA. Terra Nova propose de conditionner certains allègements fiscaux ou aides publiques à ces efforts de formation, afin de renforcer les compétences des actifs et d’assurer une transition technologique réussie.
- Adapter les systèmes éducatifs : L’IA doit être intégrée dans les programmes scolaires pour familiariser les élèves avec cette technologie et développer leurs compétences numériques. Ceci en ayant à l’esprit quel’IA Gen va imposer une nouvelle hiérarchie des compétences scolaires dont il faudra tenir compte.
- La formation continue doit également être renforcée pour accompagner les transitions professionnelles et permettre aux travailleurs de s’adapter aux changements induits par l’IA.
- Encourager une gestion prévisionnelle des emplois et compétences (GPEC) : Les entreprises doivent identifier les emplois menacés par l’automatisation et anticiper les besoins en nouvelles compétences. Cela inclut la mise en place d’outils pour détecter les collaborateurs susceptibles de devenir des ambassadeurs des usages de l’IA au sein des organisations.
Pour conclure, le think tank, qui tourne résolument le dos au pessimisme, explique : « L’IA Gen sera ce que nous en ferons collectivement. Son destin n’est pas entre les seules mains des ingénieurs de la Tech qui mettent au point les outils. Les inventeurs sont même souvent les plus mauvais prophètes des usages qui seront bientôt faits de leurs découvertes. Thomas Edison pensait que le phonographe permettrait d’enregistrer la parole des mourants ! Et on prête à Alexander Graham Bell l’idée que le téléphone électrique permettrait de faire entendre de la musique à distance… Les concepteurs des IA Gen ne sont pas davantage prophètes des usages qui en seront faits. A nous de façonner cette révolution pour qu’elle soit juste et utile ».